Page:Quitard - Dictionnaire des proverbes.pdf/366

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
346
ÉPA

je me réserve de faire moi-même sa part, en lui donnant le double de ce que le premier aura demandé. »

Voilà nos hommes bien joyeux, mais en même temps bien embarrassés, et quoiqu’ils n’eussent qu’à ouvrir la bouche pour obtenir une grande fortune, l’un et l’autre s’obstinaient à la tenir fermée afin de recevoir deux fois davantage. L’avare ne pouvait consentir à se priver de ce qu’il n’aurait pas eu l’esprit de souhaiter, ni l’envieux à jouir de tous les biens qui lui seraient échus en partage, à la condition de voir son camarade plus riche que lui : ils s’exhortaient mutuellement à former le vœu le plus magnifique, mais chacun d’eux conseillé par sa passion se gardait de céder à une pareille instance. Enfin l’avare transporté de fureur se précipita sur l’envieux en menaçant de l’assommer s’il continuait à se taire. Eh bien ! je vais parler, répondit celui-ci, et tu n’y gagneras rien. En même temps, par un trait unique de vengeance ou plutôt de caractère, il s’écria : Grand saint Martin, faites-moi la grâce de me priver d’un œil. Il n’eut pas plus tôt dit que la chose fut faite. L’un se trouva borgne et l’autre aveugle, et ce fut le seul bénéfice qu’ils retirèrent de leur position. Ainsi le vice fut puni par le vice même, mais il ne fut pas corrigé. Le pouvoir du saint n’allait pas jusque-là. Il ne put même obtenir que l’envieux servît de conducteur à l’avare qui ne pouvait regagner seul son logis.

épaule. — Jeter ses dettes derrière l’épaule.

Il est à Paris plus d’un drôle
Empruntant dans tous les quartiers
Et jetant assez volontiers
Les dettes derrière l’épaule.

(H. Morel.)

D’après une ancienne coutume consacrée par la loi salique, au titre de Chrenecruda ou de la cession, l’homme qui était dans l’impossibilité de payer intégralement la composition exigée de lui, devait produire douze témoins chargés d’attester par serment son insolvabilité. Reconduit ensuite à son logis, il y ramassait, aux quatre coins, un peu de poussière qu’il mettait dans le creux de sa main gauche ; après quoi, se plaçant sur le seuil et tenant le poteau de la porte avec la main droite, il