Page:Régnier - L’Amphisbène, 1912.djvu/133

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

barrières blanches, où s’ébattent vos poneys, et le grand ravin qui longe la route avant d’arriver à la longue allée d’eucalyptus par où l’on parvient au cottage. J’allais souvent m’y promener à votre rencontre, à l’heure où vous reveniez de San Francisco. En un mot, mon cher Jérôme, j’aime votre Burlingame, et j’ai de l’affection pour vous. J’espère que vous ne vous opposerez à aucune de ces deux conclusions et à aucun de ces deux sentiments.

Celui que je porte à votre maison me pousse, maintenant, à vous donner un conseil. Au cas où vous compteriez vous y installer avec Miss Hardington, ne cherchez pas, je vous en conjure, à agrandir et à embellir le cottage. Laissez-le tel qu’il est. Ne jouez pas au milliardaire, bien que vous alliez devenir un de ces personnages, ce qui me fait plaisir pour vous, et qui, aussi, me fait un peu peur, car je désire sincèrement que vous soyez heureux. Ce souhait me ramène au second des deux sentiments que j’exprimais tout à l’heure : mon affection pour vous.

Je ne doute pas, mon cher Jérôme, que Miss Hardington ne soit une femme parfaite et ne fasse votre bonheur. Vous avez, du reste, tous les atouts au jeu. Alicia vous adore et vous approuvera en tout ce que vous voudrez, ce qui vous sera assez agréable, car, entre nous, vous êtes quelque peu égoïste. Ne le prenez pas en mauvaise part. C’est une simple remarque que j’en fais, et non pas un blâme que j’en porte. Vous êtes ainsi, et chacun de nous est ce qu’il peut. Tel que vous êtes, vous m’êtes très cher. Et, cependant, vous en avez paru douter dans la lettre que vous m’écrivîtes après mon départ.

Eh bien ! vous aviez tort. Laissez-moi plutôt croire que ce que vous en disiez était l’effet d’une feinte modes-