Page:Régnier - La Canne de jaspe, 1897.djvu/152

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rouges s’y suivirent et composèrent des semaines, et on touchait déjà aux confins de l’été et de l’automne. L’air devint plus frais ; les choses s’aggravèrent d’une sorte de lourdeur en s’ankylosant imperceptiblement de somnolence méditative. Hertulie, à vivre seule dans sa maison, y contracta une stupeur lasse d’accord avec l’attitude immobile de ses pensées.

Un jour, songeant ainsi en face de sa fenêtre ouverte sur un des derniers ciels tièdes de la saison, vers midi, elle vit, avec surprise, une flèche, lancée du dehors, s’accrocher un instant aux dentelles des rideaux, y vaciller, puis tomber et se ficher droite dans le tapis.

Dans la rue déserte aucun pas ne s’éloignait. D’où venait cette flèche ? sa pointe d’acier triangulaire luisait ironiquement. Que voulait dire ce message, car Hertulie comprit que c’en était un et ne douta pas qu’il ne vînt d’Hermotime, non plus qu’ensuite ce poignard nu où sa main tressaillit un soir en le trouvant sur la table. Ce singulier présent l’effraya par son présage peut-être de quelque tragique aventure, mais la pauvre amie s’entendait peu aux allégories, et, de jour en jour, elle allait s’attristant davan-