Page:Régnier - La Canne de jaspe, 1897.djvu/175

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il avait été longtemps le Pauvre Pêcheur qu’on voit à l’estuaire du fleuve, debout sur sa barque immobile.

L’eau passe lentement le long du bordage et, comme elle vient de très loin, du fond des terres sylvestres ou plantureuses, elle entraîne à la dérive des feuilles, des pailles et parfois une fleur, des herbes qui s’entravent au bateau ou tournoient dans quelque remous. Le ciel est gris sur une mer pâle ; le sable des berges va rejoindre les dunes du rivage ; la barque oscille imperceptiblement ; souffrante et lasse, elle geint : la plainte de ses jointures se mêle aux soupirs du câble et les bras maigres ne lèvent qu’un filet vide.

Depuis des jours et des années, il l’avait bien souvent levé en vain. Le poisson ne s’y prenait