Page:Régnier - La Canne de jaspe, 1897.djvu/232

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de soleil. Midi flamboyait aux rosaces épanouies et aux verrières incandescentes, et les Clercs, glabres et sournois, songeaient, en voyant cette fille nue qui passait au milieu d’eux, étrangère à leur concupiscence, que le Sire de Carnoët épousait là, par maléfice, quelque Sirène ou une Nymphe pareille à celles dont parlent les livres païens. L’Evêque ne venait-il pas d’ordonner aux thuriféraires de charger leurs encensoirs, pour que la fumée s’interposant entre cette Visiteuse et le regard de Dieu et des hommes, isolât, de son voile épais, le groupe insolite qu’on apercevait, à travers une brume odorante, courbant, devant l’autel, une chevelure d’or et une nuque d’argent, sous le geste bénédicteur de la haute crosse qui consacrait l’échange de l’anneau.

La bergère Héliade, qui s’était mariée nue, vécut longtemps avec Barbe-Bleue qui l’aima et ne la tua point comme il avait tué Emmène, Poncette, Blismode et Tharsile et cette Alède qu’il ne regrettait plus.

La douce présence d’Héliade égaya le vieux château. On la voyait tantôt vêtue d’une robe blanche comme celle des Dames allégo-