Page:Régnier - La Canne de jaspe, 1897.djvu/98

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ses monuments encore debout, le squelette de sa grandeur passée. Elle s’était décharnée peu à peu, perdant ses entours, recroquevillée en son enceinte qu’elle ne remplissait plus. Au centre elle tassait ses maisons en un bloc compact, vaste encore ; ailleurs, elle clairsemait ses masures et partout elle sommeillait en torpeur, avec parfois le sursaut d’un bourdon ou le carillon d’une sonnerie.

Les rues, dallées de pierres plates ou durcies de cailloutis, s’entrecoupaient bizarrement pour aboutir à des places carrées. Des marchés se tenaient là. Les troupeaux de la contrée s’y réunissaient pour en repartir dispersés au gré de l’achat. L’enchère et l’office étaient, tour à tour, la seule occupation des habitants. La ville restait rustique et dévote. Le pas vif des moutons piétinait sur le pavage où retentissait la sandale des moines. Pasteurs et ouailles se croisaient. Le relent des toisons se confondait avec l’odeur des bures. Le vent sentait l’encens et le suint. Tontes et tonsures, pâtres et prêtres.

J’étais arrivé à l’angle de deux voies. Une fontaine y coulait dans un bassin usé. Je me