Page:Régnier - Les Jeux rustiques et divins, 1897, 2e éd.djvu/278

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
274
LES JEUX RUSTIQUES ET DIVINS


L’OBSTINÉ


Si le paon, la colombe, et si le cygne blanc
Ont volé loin de toi et fui tes mains tendues,
Regarde tournoyer les trois plumes perdues
Éparses de la queue ou du col ou du flanc.

Regarde, lentement, lourde qui fut ailée,
Descendre peu à peu dans le soleil jauni
La plume chatoyante et la plume ocellée
Et celle qui fut blanche et que rien n’a terni.

La première est tombée en l’herbe et se repose
Comme pour y mourir et s’endort, et, plus haut,
L’autre tremble longtemps accrochée à des roses,
Et la dernière glisse et flotte encor sur l’eau.

Ramasse le bouquet des trois plumes divines
Qui furent l’Orgueil rauque et l’Amour qui se plaint
Et celle aussi qui souffre aux pointes des épines
Et dont tu sais le nom éternel et divin.