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LA DOUBLE MAÎTRESSE

ouvrir avec une révérence. Qu’en dites-vous, monsieur de Portebize ?

— Cela prouve seulement, répondit M. de Portebize, que M. Hubertet aime le service des jolis visages.

— Ah ! Monsieur, criait l’abbé en se débattant, n’écoutez pas ces messieurs ; j’ai pris Fanchon chez moi qu’elle était haute comme cela…

— Et que pensez-vous qu’il ait fait apprendre à la petite ? glapissait Clairsilly. La couture, les modes, la lingerie, le service ou la cuisine ? Non, Monsieur, vous n’y êtes point, elle étudie la Danse.

— C’est vrai, intervint Mlle  Damberville, que Fanchon danse à ravir.

— Eh bien, dit l’abbé, qui semblait résigné à la tracasserie, cela ne vaut-il pas mieux que de la faire peiner aux métiers de l’aiguille ou aux travaux du ménage ? Elle n’aura point les yeux rougis et les doigts piqués. La danse favorise la santé et augmente les grâces du corps. Elle aiguise l’esprit ; il en faut pour bien danser, et Fanchon en a beaucoup. Par la danse on tient un état dans le monde, et les hommes vous savent gré de représenter à leurs yeux les Bergères, les Princesses et les Divinités. Cela les porte à vous traiter comme l’une d’elles. Ne nous considère-t-on point d’après notre apparence, et celle qu’on prend à figurer les plus voluptueuses, les plus touchantes et les plus nobles, nous met en faveur à la vue de tous et nous rehausse en leur imagination. M. de Portebize verra toujours Ariane en Mlle  Damberville. N’êtes-vous point de mon avis, Monsieur ?