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l’Acadie retentissaient des combats fratricides de Français contre Français ![1]

Delatour, proscrit d’Acadie, erra quelques années sur les côtes de l’Amérique. Il vint à Québec en 1646 et y fut salué, à son arrivée, par le canon de la ville et logé au château Saint-Louis[2]. Il demeura une couple d’années dans le Canada, s’occupa de la traite des pelleteries dans la baie d’Hudson, puis passa en France. D’Aulnay étant mort, sur ces entrefaites, des suites d’un accident de rivière (24 mai 1650), Delatour, aussitôt que cette nouvelle lui parvint, s’arrangea pour obtenir une commission royale et s’empressa de rentrer en Acadie avec une petite troupe que cornmandait un gentilhomme normand de ses amis, Mius d’Entremont. La veuve de Charles d’Aulnay lutta le mieux qu’elle put pour maintenir ses droits et ceux de ses enfants ; mais, après divers pourparlers, ces discussions aboutirent à une transaction bizarre : Delatour, qui était veuf, épousa Mme d’Aulnay le 24 février 1653.

Les litiges pendants en Acadie paraissaient ainsi résolus et, par un singulier revirement de la fortune, Delatour se trouvait en possession des biens, des honneurs et de la femme de celui qui l’avait poursuivi de sa haine et ruiné de fond en comble. Sauf les fiefs de Denys, sur le détroit de Canceau et dans les îles du golfe Saint-Laurent, tout l’ancien gouvernement de Razilly était dans sa main. Mais au moment même où son ciel semblait le plus brillant, un orage redoutable se formait à La Rochelle. D’Aulnay, de son vivant, avait reçu, de négociants de cette ville, des avances de fonds ou de mar-

  1. Beamish-Murdoch.
  2. Garneau. Tome I, p. 151.