Page:Réveillaud - Histoire du Canada et des canadiens français, de la découverte jusqu'à nos jours, 1884.djvu/282

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aucun probablement ne regretterait la domination des cabinets de Londres.

Dans le même ordre d’idées, ajoutons que la conquête par l’Angleterre de l’Amérique du Nord eut pour conséquence presque forcée la destruction de la race indigène.

« Les Anglais ne sauvent point, dit Michelet, ne conservent point les races. Ils les remplacent seulement. — Et cela encore ne se voit que dans les rares climats moyens, où l’Anglais peut s’acclimater. Dans l’Inde, qu’est-il advenu ? Les Anglais en firent la conquête extérieure. Ils n’y vivent point et ils n’ont pu y rien créer. Dupleix, mieux compris, mieux aidé du cabinet de Versailles, aurait égalé, je le crois, la cruelle habileté, les ruses, les succès de lord Clive. Je n’y ai aucun regret. Ce qui me laisse du regret, c’est que la France, répandue, mêlée à l’élément indien, eût duré, fait race. Le mariage de Dupleix avec une femme indienne, de capacité si grande, dit assez ce que ce mariage eût pu avoir de fécond [1]. »

Avec des hommes de la trempe des Canadiens français, l’Angleterre pouvait s’attendre à rencontrer des

  1. Michelet, Hist. de France. T. XIX, p. 121. Il ne faut pas exagérer pourtant, comme Michelet est enclin à le faire, la fréquence des alliances entre les Français d’Amérique et les « Indiennes ». Grâce à l’austérité des mœurs, qui fut toujours en honneur dans la Nouvelle-France, le chiffre des naissances illégitimes fut toujours très restreint et plus restreint encore le chiffre des mariages entre Français et « sauvagesses ». Ce n’est que dans les districts éloignés des Pays d’en Haut, dans les forêts parcourues par les coureurs des bois que le « métissage » prit une certaine extension ; mais comme l’établit M. Sulte, dans son Histoire des Canadiens-Français, dans tout le Canada proprement dit la race française s’est conservée très pure et sans mélange de sang indigène.