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le vieux cévenol.

point ce succès, nous sommes sûrs que ces spectacles, réitérés de temps en temps, entretiendront parmi le peuple une haine dont il doit résulter les plus heureux effets. Par exemple, en voilà pour plus d’un mois avant que les esprits aient repris un peu de calme. S’aperçoit-on que la tranquillité se rétablisse et que l’esprit de support vienne à s’introduire ? Alors on recommence à donner des exemples ; on exhume le cadavre de quelque malheureux pour l’exposer aux insultes de la populace ; on pend un ministre, on envoie une douzaine d’hommes aux galères, et les peuples se souviennent qu’il y a des hérétiques qu’il faut haïr. » — « Ne vaudrait-il pas mieux, mon révérend père, supporter ces hérétiques et engager les sujets du roi à s’aimer les uns les autres ? Car enfin… » — « Non, monsieur, non, » reprit l’homme noir, très impatienté, « nos pères n’en ont jamais usé ainsi, et ils n’étaient pas des barbares ; ils étaient très éclairés et très humains. François 1er  nous a donné l’exemple de la manière dont il faut sonner le tocsin contre les hérétiques. S’il avait consulté un homme comme vous, il aurait toléré les prétendus réformés, et peut-être que l’oubli dans lequel il aurait laissé cette secte l’aurait anéantie. Mais qu’il s’y prit bien plus sagement ! Il ordonna une procession bien brillante et bien nombreuse ; lui-même y marchait le premier, accompagné de ses fils, la tête nue, dans une posture très humble et très dévote ; on