Page:Rabelais marty-laveaux 01.djvu/395

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Lors se mirent en bon ordre & bien serrez. Adoncques Pantagruel tira la langue seulement à demy, & les en couvrit comme une gelline faict ses poulletz.

Ce pendant ie qui vous fays ces tant veritables contes, m’estoys caché dessoubz une feuille de Bardane, qui n’estoit point moins large que l’arche du pont de Monstrible : mais quand ie les veiz ainsi bien couverts ie m’en allay à eulx rendre à l’abrit : ce que ie ne peuz tant ilz estoient comme l’on dit, au bout de l’aulne fault le drap. Doncques le mieux que ie peu ie montay dessus & cheminay bien deux lieues sus sa langue, tant que ie entray dedans sa bouche. Mais ô dieux & deesses, que veiz ie là ? Iuppiter me confonde de la fouldre trisulque si ien mens. Ie y cheminois comme l’on faict en Sophie à Constantinople, & y veiz de grans rochiers, comme les monts des Dannoys, ie croy que c’estoient les dentz : & de grans prez, de grans foretz, & de fortes & grosses villes non moins grandes que Lyon ou Poictiers. Et le premier que y trouvay, ce fut ung bon homme qui plantoit des choulx. Dont tout esbahy luy demanday. Mon amy que fays tu icy ?

Ie plante, dist il, des choux.

Et à quoy ny comment ? dys ie.

Ha monsieur, dist il, nous ne povons pas estre tous riches. Ie gaigne ainsi ma vie : & les porte vendre au marché en la cité qui est icy derriere.

Iesus (dys ie) il y a icy ung nouveau monde.

Certes (dist il) il n’est mie nouveau : mais l’on dit bien que hors d’icy il y a une terre neufve où ilz ont et soleil et lune et tout plain de belles besoingnes, mais cestuy cy est plus ancien.

Voire mais (dis ie) mon amy, comment a nom ceste ville où tu portes tes