Page:Rabelais marty-laveaux 03.djvu/109

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auec groiïes & rudes pierres, il nous fill peur & pitié enfemble. Le regardant nous tira à part vn bachelier courant du païs & monftrant vn chemin bien licé tout blanc & quelque peu feuftré de paille, nous dift, dorenauant ne defprilez l’opinion de Thales Milefien difant l’eau eftre de toutes chofes le commencement ne la fentence d’Homère affermant toute chofe prendre naifTance de l’Océan. Ce chemin, que voyez, nafquit d’eau & s’y en re- tournera : deuant deux mois les bafleaux par-cy paf- foient, à cefte heure y paflent les charrettes. Vraye- ment, dift Pantagruel, vous nous la baillez bien piteufe. En noftre monde nous en voyons tous les ans de pareille transformation cinq cens & dauan- tage. Puis confiderans les alleures de ces chemins mouuans nous dift que félon fon iugement Philo- laus, Ariftarchus, auoient en icelle Ille philofophé, Seleucus prins opinion d’affermer la terre véritable- ment autour des pôles fe mouuoir non le Ciel, en- cores qu’il nous femble le contraire eftre vérité. Comme eftans fur la riuiere de Loire nous femblent les arbres prochains fe mouuoir, toutesfois ils ne fe mouuent mais nous par le decours du batteau. Re- tournans à nos nauires vifmes que près le riuage on mettoit fus la roue trois guetteurs de chemins qui auoient efté prins en embufcade & bruHoit à petit feu vn grand paillard lequel auoit battu vn chemin & luy auoit rompu vne cofte, & nous fut dift que c’eftoit le chemin des aggeres & leuees du nil en Égypte.