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lettres et docvments.

nois brisez deux hommes morts, mais c’estoient hommes de soin : desquelz l’vn auoit le bras gauche couppé, & le visage tout en sang, l’autre auoit vn transon de picque à trauers le corps souz la faute du harnois. Autour desquelz fut recreation nouuelle ce pendant que la musique sonnoit. Car Frerot à tout son accoutrement de velours incarnat fueilleté de toille d’argent, à forme d’æsles de Souris chauue, & Fabritio auecques sa couronne de laurier, soy ioingnirent à eux : l’vn les admonestoit de leur salut, les confessoit, & absouloit comme gens morts pour la foy : l’autre les tastoit aux goussetz & en la braguette pour trouuer la bourse. En fin les descouurans & despouillans monstrerent au peuple que ce n’estoient que gens de foin. Dont fut grande risee entre les spectateurs, soy esbahissans comment on les auoit ainsi là mis & iettez, durant ce furieux combat.

A ceste retraite, le iour esclarci & purgé des fumees & perfums de la canonnerie, apparurent au mylieu de la place huit ou dix gabions en renc, & cinq pieces d’artillerie sus roue : lesquelles durant la bataille auoient esté posees par les canonniers de son Excellence. Ce qu’estant apperceu par vne sentinelle monté sus la haute tour du chasteau au son de la campanelle fut fait & ouy grand effroy & hurlement de ceux du dedens : & fut lors tiré tant d’artillerie par tous les endroits du fort, & tant de sciopes, fusees en canon, palles, & lances à feu vers les gabions posez, qu’on n’eust point ouy tonner du ciel. Ce nonobstant, l’artillerie posee derriere les gabions tira furieusement par deux fois contre le chasteau, en grand espouuentement du peuple assistant. Dont tomba par le dehors la muraille iusques