Page:Racine - Œuvres, tome 1, 1679.djvu/288

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Redemandant la foy jurée à ſa famille,
Et de Germanicus on entendra la Fille ;
De l’autre l’on verra le Fils d’Enobarbus,
Appuyé de Seneque, & du Tribun Burrhus,
Qui tous deux de l’exil rappellez par moy-meſme
Partagent à mes yeux l’autorité ſuprême.
De nos crimes communs je veux qu’on ſoit inſtruit.
On ſçaura les chemins par où je l’ay conduit.
Pour rendre ſa puiſſance & la voſtre odieuſes,
J’avoüray les rumeurs les plus injurieuſes.
Je confeſſeray tout, exils, aſſaſſinats,
Poiſon meſme…

BURRHUS.

Madame, ils ne vous croiront pas.
Ils ſçauront recuſer l’injuſte ſtratagême
D’un témoin irrité qui s’accuſe luy-meſme.
Pour moy qui le premier ſeconday vos deſſeins,
Qui fis meſme jurer l’Armée entre ſes mains.
Je ne me repens point de ce zele ſincere.
Madame, c’eſt un Fils, qui ſuccede à ſon Pere.
En adoptant Neron, Claudius par ſon choix
De ſon Fils & du voſtre a confondu les droits.
Rome l’a pû choiſir. Ainſi ſans eſtre injuſte
Elle choiſit Tibere adopté par Auguſte,
Et le jeune Agrippa de ſon ſang deſcendu
Se vit exclus d’un rang vainement pretendu.
Sur tant de fondemens ſa puiſſance eſtablie
Par vous même aujourd’huy ne peut-eſtre affoiblie.
Et s’il m’écoute encor, Madame, ſa bonté
Vous en fera bien-toſt perdre la volonté.
J’ay commencé, je vais pourſuivre mon ouvrage.