Page:Racine - Andromaque, Girard, 1668.djvu/100

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
84
ANDROMAQVE

Dy-moy, ne t’es-tu point preſentée à ſa veuë ?
L’Ingrat a-t’il rougy, lors qu’il t’a reconnuë ?
Son trouble auoüoit-il ſon infidélité ?
A-t’il iuſqu’à la fin ſoûtenu ſa fierté ?

CLEONNE.

Madame, il ne voit rien. Son ſalut, & ſa gloire
Semble eſtre auec vous ſortis de ſa memoire.
Sans ſonger qui le ſuit, Ennemis, ou Sujets.
Il pourſuit ſeulement ſes amoureux projets.
Autour du Fils d’Hector il a rangé ſa Garde,
Et croit que c’eſt luy ſeul que le peril regarde.
Phœnix meſme en reſpond, qui l’a conduit exprés
Dans vn Fort éloigné du Temple, & du Palais.
Voila, dans ſes transports, le ſeul ſoin qui luy reſte.

HERMIONNE.

Le Perfide ! Il mourra. Mais que t’a dit Oreſte ?

CLEONNE.

Oreſte, auec ſes Grecs, dans le Temple eſt entré.

HERMIONNE.

Hé bien ? À me vanger n’eſt-il pas preparé ?

CLEONNE.

Ie ne ſçay.

HERMIONNE.

Ie ne ſçay.Tu ne ſçais ? Quoy donc Oreſte encore,
Oreſte me trahit ?

CLEONNE.

Oreſte me trahit ?Oreſte vous adore.