Page:Racine - Esther, 1689, Barbin - Athalie, 1692, Thierry.djvu/17

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me firent l’honneur de me communiquer leur dessein, & mesme de me demander si je ne pourrais pas faire sur quelque sujet de pieté & de morale une espece de Poëme, où le chant fût meslé avec le récit ; le tout lié par une action qui rendist la chose plus vive & moins capable d’ennuyer.

Je leur proposay le sujet d’Esther, qui les frappa d’abord, cette histoire leur paraissant pleine de grandes leçons d’amour de Dieu, & de détachement du monde au milieu du monde mesme. Et je crus de mon costé que je trouverais assez de facilité à traitter ce sujet ; d’autant plus qu’il me sembla, que sans altérer aucune des circonstances tant soit peu considerables de l’Escriture sainte, ce qui serait à mon avis une espece de sacrilege, je pourrais remplir toute mon Action avec les seules Scènes, que Dieu lui-mesme, pour ainsi dire, a préparées.

J’entrepris donc la chose, & je m’apperceûs qu’en travaillant sur le plan qu’on m’avait donné, j’executais en quelque sorte un dessein qui m’avait souvent passé dans l’esprit, qui estait de lier, comme dans les anciennes Tragédies Grecques, le Chœur & le Chant avec l’Action, & d’employer à chanter les loüanges du vray