TRAGÉDIE. i75
Voilà comme occupe àt mon nouvel amour. Mes yeux , fans fe fermer , ont attendu le jour. Mais je m'en fais peut-être un trop belle image. File m'eft apparue avec trop d'avantage ; NarcilTe , qu'en dis-tu ?
Narcisse.
Quoij Seigneur, croira-c-on Qu'elle ait pu fî long-temps fe cacher à Néron î
Néron. Tu le fais bien , Narcifl'e. Et foit que fa colère M'imputât le malheur qui lui ravit fon frère ; Soit que fon cœur , jaloux d'une auftère fierté , Fnviât à nos yeux fa nailTante beauté ; ' ièle à fa douleur , &: dans l'ombre enfermée ,
le fc déroboit même à fa renommée : F.c c'cft cette vertu , Ci nouvelle à la Cour, Dont la perfévérance irrite mon amour. Quoi , Narcifie ? Tandis qu'il n'eft point de Romaine Que mon amour n'honore , & ne rende plus vaine j Qui , dès qu'à fes regards elle ofe fc fier, Sur le coeur de Céfar ne les vieniie cflayer ; Seule , dans fon palais , la modelle Junie Regarde leurs honneurs comme une ignominie. Fuit , &c ne daigne pas peur-ctre s'informer Gcfar cfl aimable, ou bien s'il fait aimer î o-moi , Britannicus l'aime-t-il î Narcisse.
Quoi , s'il l'aime , "-•^cur î
Néron. Si jeune encor , fe connoît-il lui même î D'un regard enchanteur connoît-il le poifon î
Narcisse. Seigneur , l'amour toujours n'attend pas la raifon. N'en doutez point, ill'aime. Inftiuits par tant de charmes; Ses yeux font déjà faits à l'ufage des larmes. A fcs moindres dtiirs il fait s'accommoder j Et pem-ctrc déjà fait-il pcrfuadcr.
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