Page:Racine Théâtre Barbou 1760 tome2.djvu/130

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Qu'il meure. Vengeons-nous. Courez: qu'on le saisisse,

Que la main des muets s'arme pour son supplice,

Qu'ils viennent préparer ces nœuds infortunés

Par qui de ses pareils les jours sont terminés.

Cours, Zatime, sois prompte à servir ma colère.

Zatime

Ah, madame!

Roxane

Quoi donc?

Zatime

Si, sans trop vous déplaire,

Dans les justes transports, Madame, où je vous vois,

J'osais vous faire entendre une timide voix:

Bajazet, il est vrai, trop indigne de vivre,

Aux mains de ces cruels mérite qu'on le livre;

Mais, tout ingrat qu'il est, croyez-vous aujourd'hui

Qu'Amurat ne soit pas plus à craindre que lui?

Et qui sait si déjà quelque bouche infidèle

Ne l'a point averti de votre amour nouvelle?

Des cœurs comme le sien, vous le savez assez,

Ne se regagnent plus quand ils sont offensés,

Et la plus prompte mort, dans ce moment sévère,

Devient de leur amour la marque la plus chère.

Roxane

Avec quelle insolence et quelle cruauté

Ils se jouaient tous deux de ma crédulité!

Quel penchant, quel plaisir je sentais à les croire!

Tu ne remportais pas une grande victoire,

Perfide, en abusant ce cœur préoccupé,

Qui lui-même craignait de se voir détrompé!

Moi, qui de ce haut rang qui me rendait si fière

Dans le sein du malheur t'ai cherché la première,

Pour attacher des jours tranquilles, fortunés,

Aux périls dont tes jours étaient environnés,