Page:Racine Théâtre Barbou 1760 tome2.djvu/183

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

TRAGÉDIE. I7Î

Vos pleurs pour Xipharès auroient daigné couler î M O N I M E.

Oui , prince, il n'eft plus temps de le diflîmuler , Ma douleur , pour Ce taire , a trop de violence. Un rigoureux devoir me condamne au fîlcnce , Mais il faut bien enfin , malgré Ces dures loix. Parler pour la première & la dernière fois. Vous m'aimez dès long-temps. Une égale tendreflc , Pour vous, depuis long-temps, m'afflige & m'intciclFe. Songez depuis quel jour ces funeltes appas Firent naître un amour qu'ils ne méritoient pas. Rappeliez un efpoir qui ne voUs dura guère , Le trouble où vous jecta l'amour de votre père. Le tourment de me perdre , &: de le voir heureux , Les rigueurs d'un devoir contraire à tous vos vœux ; Vous n'en fauricz, Seigneur, retracer la mémoire , Ni conter vos malheurs, fans conter mon hilloire ; Et, lorfque ce matin j^en écoutois le cours, Mon cœur vous répondoit tous vos mêmes difcours. Inutile, ou plutôt funefle fympathie I Trop parfaite union par le fort démentie î Ah î par quel foin cruel le Ciel avoit-il joint Deux cœurs que l'un pour l'autre il ne deftinoit point? Car, quel que foit vers vous le penchant qui m'attire. Je vous le dis , Seigneur , pour ne plus vous le dire , Ma gloire me rappelle & m'entraîne à l'autel , Où je vais vous jurer un filence éternel. J'entends , vous gémiiïèz. Mais telle eft ma mifèrc : Je ne fuis point à vous ; je fuis à votre père. Dans ce delFein, vous-même, il faut me foutenir ; Et de mon foible cœur m'aider à vous bannir. J'attends du moins, j'attends de votre complaifancc. Que déformais, par- tout , vous fuirez ma préfence. J'en viens de dire aflcz pour vous perfuadcr Que j'ai trop de raifons de vous le commander. Mais, après ce moment , fi ce cœur magnanime D'un véritable amour a brûlé pour Monime ,

H W

�� �