Page:Racine Théâtre Barbou 1760 tome2.djvu/278

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

170 I P H I G E N 1 E y

Barbare ! C'eft donc là cet heureux facrifîce

Que vos foins préparoienr avec tant d'artifice î

Quoi , l'horreur de foufcrire à cet ordre inhumain ,

N'a pas, en le traçant, arrêté votre main 1

Pourquoi feindre à nos yeux une fauflè triftefle ?

Penfez-vous par des pleurs prouver votre tendrelfe ?

Où font-ils ces combats que vous avez rendus î

Quels flots de fang pour elle avez-vous répandus ?

Quel débris parle ici de votre réfiftance ?

Quel champ couvert de morts me condamne au filencc ?

Voilà par quels témoins il falloit me prouver.

Cruel , que votre amour a voulu la fauver.

Un oracle fatal ordonne qu'elle expire.

Un oracle dit-il tout ce qu'il femble dire ?

Le Ciel, le jufte Ciel, par le meurtre honoré.

Du fang de l'innocence eft-il donc altéré ?

Si du crime d'Hélène on punit fa famille.

Faites chercher à Sparte Hermione fa fille.

Laiflez à Ménélas racheter d'un tel prix

Sa coupable moitié dont il eft trop épris.

Mais vous , quelles fureurs vous rendent fa viûime ?

Pourquoi vous impofer la peine de fon crime ?

Pourquoi , moi-même enfin me déchirant le flanc ,

Payer fa folle amour du plus pur de mon fang î

Que dis-je ? Cet objet de tant de jaloufie , Cette Hélène, qui trouble & l'Europe & l'Afie, Vous femble-r-elle un prix digne de vos exploits î Combien nos fronts pour elle ont-ils rougi de fois î Avant qu'un nœud fatal l'unit à votre frère, Théfée avoir ofé l'enlever à fon père , Vous favez, & Calchas mille fois vous l'a dit , Qu'un hymen clandeftin mit ce prince en fon lit , Et qu'il en eut pour gage une jeune prjncefle , Que fa mère a cachée au retle de la Grèce. Mais non , l'amour d'un frère , & fon honneur blcffé Sont les moindres des foins, dont vous êtes prcfle. Cette foif de régner, que rien ne peut éteindre , L'orgueil de voir vingt rois vous fcrvir & vous craindre,

�� �