Page:Racine Théâtre Barbou 1760 tome2.djvu/96

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Il faut qu'à tous moments, tremblante et secourable,

Je donne à ses discours un sens plus favorable.

Bajazet va se perdre. Ah! si, comme autrefois,

Ma rivale eût voulu lui parler par ma voix!

Au moins, si j'avais pu préparer son visage!

Mais, Zaïre, je puis l'attendre à son passage:

D'un mot ou d'un regard je puis le secourir.

Qu'il l'épouse, en un mot, plutôt que de périr.

Si Roxane le veut, sans doute il faut qu'il meure.

Il se perdra, te dis-je. Atalide, demeure;

Laisse, sans t'alarmer, ton amant sur sa foi.

Penses-tu mériter qu'on se perde pour toi?

Peut-être Bajazet, secondant ton envie,

Plus que tu ne voudras aura soin de sa vie.

Zaïre

Ah! dans quels soins, Madame, allez-vous vous plonger?

Toujours avant le temps faut-il vous affliger?

Vous n'en pouvez douter, Bajazet vous adore.

Suspendez ou cachez l'ennui qui vous dévore;

N'allez point par vos pleurs déclarer vos amours.

La main qui l'a sauvé le sauvera toujours,

Pourvu qu'entretenue en son erreur fatale,

Roxane jusqu'au bout ignore sa rivale.

Venez en d'autres lieux enfermer vos regrets,

Et de leur entrevue attendre le succès.

Atalide

Eh bien! Zaïre, allons. Et toi, si ta justice

De deux jeunes amants veut punir l'artifice,

O ciel, si notre amour est condamné de toi,

Je suis la plus coupable: épuise tout sur moi!

Acte deuxième

Scène I.

Bajazet, Roxane

Roxane

Prince,