Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T3.djvu/160

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toute cette fortune, ma nièce, dit-elle, et je voudrois vous la conserver. Vous montrez une vertu que je n’attendois pas.

Comment ai-je pu mériter ce reproche, dit Emilie ?

Ce n’est pas un reproche, reprit madame Montoni, je ne voulois que louer votre vertu.

Hélas ! dit Emilie, quel mérite a cette vertu ? Je n’ai point de tentation à vaincre.

Et M. de Valancourt, reprit la tante ? Madame, interrompit Emilie, changeons de conversation, et de grâce ne soupçonnez pas mon cœur d’un aussi choquant égoïsme. L’entretien finit, et Emilie resta près de madame Montoni, et ne se retira que fort tard.

En ce moment tout étoit calme, et la maison semblait ensevelie dans le sommeil. En traversant tant de galeries longues et désertes, sombres et silencieuses, Emilie se sentit effrayée sans savoir pourquoi. Mais quand, en entrant dans le corridor, elle se rappela l’événement de l’autre nuit, la terreur s’empara d’elle ; elle frémit qu’un objet comme celui qu’Annette avoit vu ne se présentât à ses yeux, et que, soit idéale, soit fondée, la peur ne produisît un pareil effet sur ses sens. Elle ne savoit pas bien de