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d’une harmonie que le silence de la nuit rendoit plus touchante. Bientôt elle sembla s’éloigner, s’affoiblir successivement, et enfin cessa tout-à-fait.

Emilie continuoit d’écouter, plongée dans ce doux repos où une musique suave laisse l’esprit. Les sons ne revinrent plus. Ses pensées errèrent long-temps sur une circonstance si étrange ; il étoit singulier d’entendre à minuit de la musique, lorsque tout le monde devoit, depuis plusieurs heures, être endormi, et dans un château où, depuis tant d’années, on n’avoit rien entendu qui ressemblât à de l’harmonie. De longues souffrances avoient rendu son esprit sensible à la terreur, et susceptible de superstition. Il lui sembla que son père avoit pu lui parler par ces accords, pour lui inspirer de la consolation et de la confiance sur le sujet dont alors elle étoit occupée. La raison lui dit néanmoins que cette conjecture étoit ridicule, et elle ne s’y attacha pas ; mais par une inconséquence naturelle à une imagination vive, elle se livra à de plus bizarres idées ; elle se rappela l’événement singulier qui avoit donné le château à son possesseur actuel ; elle considéra la manière mystérieuse dont l’ancienne propriétaire avoit disparu ; jamais