Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T3.djvu/97

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mille questions à-la-fois, et toutes accompagnées de gestes si furieux, qu’elle se trouva hors d’état d’y répondre. Il la quitta soudain, et parcourut les vestibules avec le désordre d’un insensé, maudissant à-la-fois Montoni et sa propre extravagance.

Quand la bonne femme se vit en liberté, et se fut remise de sa frayeur, elle lui conta tout ce qu’elle savoit ; c’étoit, à la vérité, bien peu de chose, mais assez pour apprendre à Morano que Montoni étoit allé à son château des Apennins. Il l’y suivit, aussitôt que ses gens eurent achevé ses préparatifs. Un ami l’accompagnoit, ainsi qu’un grand nombre de domestiques. Il étoit décidé à obtenir Emilie, ou à faire tomber sur Montoni toute sa vengeance. Quand son esprit fut remis de sa première effervescence, et que ses idées se furent éclaircies, sa conscience lui suggéra certains souvenirs, qui expliquoient assez toute la conduite de Montoni. Mais comment ce dernier auroit-il pu soupçonner une intention que lui seul connoissoit, et qu’il ne pouvoit deviner ? Sur ce point, néanmoins, il avoit été trahi par l’intelligence sympathique qui existe, pour ainsi dire, entre les ames peu délicates, et qui fait juger à un homme ce qu’un autre doit faire dans une circons-