Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T5.djvu/111

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ensuite le comte avec tant d’instance de lui déclarer ce qu’il savoit, que sa violente émotion devint visible, et que, jetant sur elle un regard de tendre compassion, le comte en devint plus embarrassé.

Le chevalier et mon fils, lui dit-il, firent connoissance chez un de leurs camarades, où moi-même je le rencontrai. Je l’invitai à venir chez moi ; j’ignorois alors ses liaisons avec une espèce d’hommes, rebut de la société, qui vivent du jeu et passent leur vie dans la débauche. Je connoissois seulement quelques parens du chevalier, et je regardois ce motif comme suffisant pour le recevoir chez moi. Mais vous souffrez… je cesserai ce discours. — Non, monsieur, lui dit Emilie ; je vous supplie de continuer, je suis seulement au désespoir. — Seulement, reprit le comte ! J’appris bientôt que ses liaisons l’avoient entraîné dans un cours de dissipation, et dont il ne paroissoit pas avoir le pouvoir ou la volonté de se retirer. Il perdit au jeu une somme énorme ; ce goût devint une passion, il s’y ruina. J’en parlai avec intérêt à ses parens ; ils m’assurèrent que leurs remontrances avoient été vaines, qu’ils étoient fatigués d’en faire. J’appris ensuite qu’en considération de ses talens pour le jeu, presque toujours heureux quand la mauvaise