Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T5.djvu/164

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

m’approchai doucement jusqu’auprès de la porte entr’ouverte : la musique étoit bien triste ; mais elle étoit bien douce. Je vis madame qui tenoit son luth ; des larmes couloient sur ses joues : elle chantoit une hymne de vêpres : si tendre, si touchante ! Sa voix trembloit : elle s’arrêtoit pour essuyer ses larmes, et reprenoit avec plus de douceur. J’avois souvent entendu chanter madame ; mais jamais je n’avois rien entendu de si délicieux. Je pleurai presque en l’écoutant : elle avoit été en prières, à ce que je crois ; car son livre étoit ouvert sur la table auprès d’elle. Hélas ! il est encore ouvert. Sortons de cet oratoire, mademoiselle, ajouta Dorothée ; mon cœur y souffre trop.

Elles rentrèrent dans la chambre ; Emilie voulut encore revoir le lit. Lorsqu’elle fut devant la porte qui conduisoit dans le salon, elle crut, à la foible lueur de la lampe, voir quelque chose se glisser dans la partie la plus obscure de cette pièce. Son imagination probablement avoit été trop ébranlée par les objets dont elle étoit environnée, sans quoi cette circonstance imaginaire ou réelle ne l’eût point autant affectée ; elle s’efforça de cacher son émotion à Dorothée : mais celle-ci la vit changer de