Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T5.djvu/173

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Dans tout autre temps ces parties eussent été délicieuses pour Emilie : trop accablée alors par sa mélancolie, elle trouvoit que rien de ce qu’on nomme amusement n’avoit le pouvoir de la distraire, et très-souvent elle observoit que la touchante mélodie de ces concerts augmentoit sa tristesse à un degré insupportable.

Elle préféroit de se promener seule dans les bois qui ombrageoient le promontoire. Leur ombre épaisse favorisoit sa rêverie ; et dans les échappées de vue qu’ils offroient, elle découvroit la Méditerranée, ses voiles flottantes, et le repos uni avec la majesté. Les sentiers de ces bois n’étoient point fréquentés ; une végétation abondante les semoit de plantes et de verdure ; le goût du possesseur y permettoit à peine l’élaguement de quelques branches. Sur une éminence, au fond de ces bois, étoit un siège rustique formé sur le tronc d’un vieux chêne renversé. Cet arbre avoit été superbe, et quelques-uns de ses rameaux encore verts, formoient avec le hêtre et le sapin un dais naturel à ce trône champêtre. La vue, sous leur ombrage, se prolongeoit jusqu’à la mer, en passant sur les sommets des autres bois. À gauche, par une ouverture, on voyoit une tour ruinée située sur la pointe d’un