Page:Ramayana trad Hippolyte Fauche vol2.djvu/143

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dra fortuné des Rakshasas et sa ville capitale ! Je pars et je reviens dans cette heure même, couvert du sang des quadrumanes immolés ; car je ne puis supporter davantage cette horrible offense que l’on fit à mon seigneur ! »

Après lui un Démon, pareil à une montagne et léchant ses lèvres avec sa langue, qu’il promène autour de sa bouche, Yadjnahanou (c’est ainsi qu’il était nommé) jette ces mots dans sa colère : « Que tous les Rakshasas goûtent le plaisir dans la compagnie de leurs épouses : je veux dévorer à moi seul tous les princes des peuples quadrumanes ! »

Mais soudain, arrêtant les Démons qui sortent, les armes au poing, Vibhîshana les fait tous rentrer, et, joignant ses mains, adresse au monarque ce langage : « Une marche conduite avec circonspection et suivant les règles, mon ami, aboutit nécessairement à son but. On ne peut évaluer, noctivagues Démons, ni les armées, ni les forces de ces quadrumanes : d’ailleurs, il ne faut jamais se hâter de mépriser un ennemi. Râma avait-il commencé lui-même par offenser le roi des Rakshasas, pour que celui-ci vînt enlever dans le Djanasthâna la noble épouse de ce magnanime !

« Si Khara vaincu périt sous les coups de Râma dans une bataille, il y avait nécessité pour celui-ci ; car il faut que l’être, à qui la vie fut donnée, emploie toutes ses forces à défendre sa vie.

« Un affreux danger nous menace à cause de cette fille des rois : que Sîtâ soit donc renvoyée à son époux ! le salut de ta famille l’exige, il n’y a là nul doute.

« Il n’est pas bon pour toi de s’aventurer dans une guerre funeste avec ce héros sage, dévoué à son devoir, plein de vaillance, à l’immense vigueur, à la grande âme,