Page:Ramayana trad Hippolyte Fauche vol2.djvu/146

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qu’attendent depuis si longtemps nos guerriers, toujours affamés de combats ! Certes ! les massues, les arcs, les haches, les piques de fer ne manquent point ici !

« Les guerriers, de qui la plus belle parure est le courage, désirent les porter au milieu des combats !

« La terre aspire à se joncher de cadavres et, tout arrosée de leur sang, comme d’un parfum liquide, à rire en quelque sorte elle-même avec la bouche, entr’ouverte à son dernier soupir, de ces guerriers aux belles dents ! Que tes ordres soient donc envoyés aujourd’hui même à tous nos combattants ! »

Doué de constance, versé dans le devoir et dans les affaires, Vibhîshana, sur un ton doux, prit de nouveau la parole en ces termes : « Les conseils donnés par tes ministres étaient bons, amis, tout à fait en prévision de l’avenir et surtout d’une importance considérable. En effet, un ministre dévoué, rejetant loin de lui ce qui est simplement agréable et s’attachant à tout ce que l’affaire a de plus grave en elle-même, doit toujours dire uniquement ce qui est bien. Aussi vais-je, appuyé sur la confiance que m’inspirent tes grandes qualités, dire une chose que j’ai bien étudiée, roi des rois, dans ma pensée attentive. On poursuit dans ce bas monde les jouissances que procurent l’amour, la richesse et le devoir ; mais c’est toujours avec l’œil du devoir qu’il faut examiner ici-bas la richesse et l’amour. Car l’homme qui, désertant le devoir, ne voit dans la richesse que la richesse et dans l’amour que le plaisir de l’amour, n’est pas un homme sage dans ses pensées.

« Quel homme judicieux, s’il prend sa conviction dans la raison, oserait dans les conseils d’un roi donner une fausse couleur à l’attentat commis sur l’épouse d’autrui,