Page:Ramayana trad Hippolyte Fauche vol2.djvu/226

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aussi hauts que des cimes de montagnes ; il ouvre sa bouche semblable à un volcan sous-marin, et bâille hideusement. Cet horrible spasme achève de réveiller ce Démon à la force sans mesure : il pousse un soupir, comme le vent qui souffle à la fin du monde. Ensuite le Démon réveillé, ayant fait rougir ses yeux, en les frottant, promena ses regards de tous les côtés et dit aux noctivagues : « Pour quelle raison vos excellences m’ont-elles réveillé dans mon sommeil ? Ne serait-il point arrivé quelque chose de fâcheux au monarque des Rakshasas ? En effet, on ne trouble pas dans le sommeil une personne de mon rang pour une faible cause. »

« Le roi souverain de tous les Rakshasas a bien envie de te voir. Veuille donc aller vers lui, répondent-ils ; fais ce plaisir à ton frère. »

Aussitôt qu’il eut ouï la parole envoyée par son maître, l’invincible Koumbhakarna : « Je le ferai ! » dit le géant à la grande vigueur, qui se leva de sa couche, et, joyeux, se lava le visage, prit un bain et revêtit ses plus riches parures. Ensuite il eut envie de boire et demanda au plus vite un breuvage, qui répand la force dans les veines. Soudain les noctivagues s’empressent d’apporter au géant, comme Râvana leur avait prescrit, des liqueurs spiritueuses et différentes sortes d’aliments pour la joie de son cœur. Le colosse affamé se jeta avidement, avec une bouche enflammée, avec des yeux ardents, sur la chair des buffles, sur les viandes de sangliers, sur les boissons préparées, et, non moins altéré, il but à longs traits du sang.

À l’aspect de cet éminent Rakshasa, tel qu’à le voir on eût dit une montagne, et qui semblait marcher dans les airs, comme jadis l’auguste Nârâyana lui-même ; à cet