Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/414

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Voilà, à proprement parler, la théorie de la valeur internationale.

« En tout lieu, dit Stuart Mill, la valeur d’une chose dépend de ce qu’elle coûte à acquérir dans ce lieu ; et par conséquent celle d’un article d’importation dépend du coût de l’article d’exportation dont le prix a servi à payer l’article importé[1]. »

Ainsi dans chacun des deux pays les valeurs des marchandises entrées et des marchandises sorties s’adaptent d’elles-mêmes aux quantités de ces marchandises, pour pouvoir être égales de part et d’autre : voilà pourquoi nous avions admis tout à l’heure que 100 journées du travail de la Pologne, exprimées en blé, achetaient 150 journées du travail de l’Angleterre, exprimées en drap. Et cette adaptation n’épargne pas non plus la monnaie, puisque celle-ci n’est pas autre chose qu’une marchandise. Si elle est bien cela entre acheteur et vendeur d’un même pays, qui la prennent comme évaluateur général et qui en ceci ne l’envisagent que sous son pouvoir marchand, on ne voit pas pourquoi elle serait autre chose entre deux nations assimilées à un acheteur et à un vendeur[2]. La théorie des débouchés de Say ne s’occupait pas du mouvement international de la monnaie : la théorie ricardienne de la valeur internationale l’embrasse au contraire dans ses applications[3]. Or — nous sommes bien obligés de le reconnaître — Ricardo a pour lui le sentiment commun, quoique la pure théorie libérale voulût, bon gré mal gré, mais certainement à tort, nous désintéresser de cette observation des entrées ou des sorties de numéraires[4].

Tout cela se comprend mieux si l’on songe que la mon-

  1. Stuart Mill, Principes d’économie politique, I. III, ch. xviii, § 1, t. II, p. 117.
  2. Fontana-Russo, op. cit., pp. 70 et s.
  3. Sauvaire-Jourdan, Préface à la traduction de la Théorie du commerce international de Bastable, pp. x et s.
  4. En ce sens, de Laveleye, la Monnaie et le bimétallisme international, 2e édition.