Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/552

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tableau de l’ascension économique de l’humanité. Le même esprit d’évolutionnisme y règne d’un bout à l’autre. On y voit l’économie familiale qui part de la promiscuité bestiale pour arriver à la famille contemporaine à travers le matriarcat et le patriarcat ; on y voit l’habitat se transformer peu à peu en nos vastes agglomérations urbaines et le clan s’élargir pour aboutir à la commune et à l’État[1]. « Le bien, dit expressément M. Schmoller, n’a pas une réalité fixe, mais une réalité en voie perpétuelle de formation : chaque époque, chaque système religieux et philosophique institue une hiérarchie des buts, des vertus, des obligations[2]. » La religion, cependant, est provisoirement bonne pour moraliser les classes inférieures ; car, si pour la remplacer « nous avons un idéal laïque et les spéculations des sciences de la nature……, le noyau et la valeur morale en sont encore douteux, et ce sera la grande question de savoir si les progrès de l’État, de l’école, de l’opinion publique sont déjà aujourd’hui où seront assez forts demain pour que le commun des hommes puisse se passer de l’appui et des règles de la religion[3]. »

Ces prémisses philosophiques ; commandent l’œuvre économique dans son entier : car « les systèmes économiques ne sont que des repousses, des rejetons des systèmes moraux, et ils en dépendent[4] » : et « notre exposé des phénomènes de circulation est un résultat du point de vue social, évolutionniste et éthique que nous avons justifié[5] ». Mais avec cela, dirons-nous, il y a plus d’une erreur de logique non moins que d’histoire : et que signifie, par exemple, une étude du concept de la valeur en général qui suit celle de la monnaie au lieu de la précéder[6] ?

  1. Op. cit., t. I.
  2. Op. cit., t. I, p. 110.
  3. Ibid., p. 117.
  4. Op. cit., t. I, p. 168.
  5. Op. cit., t. III, p. 6.
  6. Op. cit., § 170, t. III, p. 241.