Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/726

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du travail. Les lois humaines et l’organisation économique de la société en affranchissent bien certains hommes : toutefois la morale ne les y soustrait point ; et Mill, qui n’en appelle pas au devoir moral, Mill, qui ne peut pas l’invoquer puisqu’il est lui-même un utilitaire de l’école de Bentham, serait fort embarrassé d’indiquer pour ce mal un autre remède que la contrainte socialiste et la suppression de l’hérédité.

Le chapitre « De la propriété » est encore bien plus probant et plus caractéristique sur le socialisme de Stuart Mill.

Quel est le principe de la propriété ? demande Mill. Est-ce l’utilité sociale ? Non, quoique celle-ci plaide pour le maintien de la propriété là où l’institution en existe déjà. C’est que la propriété a sa source dans la consécration du droit de la force et dans l’intérêt de la paix[1] ; et il y aurait ici de curieux rapprochements à faire avec la théorie de Rousseau dans le Discours sur l’inégalité des conditions.

Après cela, Mill doit être peu sévère pour les imaginations des adversaires de la propriété. Il examine successivement le communisme[2], le saint-simonisme et le fouriérisme[3]. Au communisme il fait bien le reproche d’être : 1° stérile, par le défaut d’intérêt personnel ; 2° difficile à pratiquer ; à cause de la difficulté qu’il y aurait à appliquer la justice dans la répartition : il conclut cependant que, « s’il fallait opter entre le communisme avec toutes ses chances et l’état actuel de la société avec toutes ses souffrances et ses injustices, toutes les difficultés du communisme, grandes ou petites, ne seraient qu’un grain de poussière dans la balance[4]. » Le mérite d’Owen et du socialisme en général, c’est « d’assigner aux femmes des

  1. Ibid., § 2.
  2. Ibid., § 3.
  3. Ibid., § 4.
  4. Loc. cit., p. 243.