Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/769

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nouveau », où les producteurs manuels de la richesse auraient eu droit les premiers à sa jouissance[1]. Le chartisme aboutit en 1839 à un essai de grève générale et de panique financière et a de longues émeutes qui furent très-sévèrement réprimées.

En 1839, Carlyle publia On Chartism, plaidoyer en faveur du chartisme : il y préconisait un changement dans la morale, la régénération par le travail, le remplacement du mammonisme par l’idéalisme, de l’égoïsme par le sacrifice et de l’individualisme par l’esprit social.

Charles Kingsley et Frédérick Denison Maurice, tous deux membres du clergé anglican, furent les premiers à prendre, vers 1848, le nom de « socialistes chrétiens ». Ils formèrent alors avec quelques amis un petit groupe qui avait pour but « d’amener toutes les classes de la société à la connaissance de leurs devoirs et de leurs intérêts, et de remplacer autant que possible le régime de la concurrence illimitée par un système de coopération universelle ». Hors cela, ils n’avaient pas de programme trop circonscrit. « Quiconque — disait en effet Maurice — reconnaît le principe de la coopération comme un principe plus fort et plus vrai que la concurrence, a droit à l’honneur ou à la disgrâce d’être appelé socialiste[2]. » Ce groupe fonda, en 1848, la Christian socialist Society, qui eut pour organe le journal The Christian socialist.

Ni le programme, ni le choix des procédés à prendre n’étaient alors bien subversifs. Mais cette modération du début fut assez vite répudiée, et nombre des successeurs de Maurice, de Kingsley et de Ludlow ont ajouté aux théories chrétiennes sociales de ceux-ci des vues économiques qu’ils ont empruntées à Karl Marx, à Lassalle et à Henri George. Ils se sont fractionnés en trois groupes, dont le plus avancé en radicalisme a été la Guild of St--

  1. Verhaegen, Socialistes anglais, p. 24.
  2. Rév. Maurice, Christian socialism, p. 4.