Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/103

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restreint. La logique est un instrument nécessaire au développement de la pensée ; mais elle peut servir à développer autre chose que la vérité. Les systèmes les plus faux peuvent être admirables d’enchaînement : preuves en soient la dogmatique de Calvin et la philosophie de Spinosa.

Les esprits exclusifs sont ceux qui ont la confiance la plus entière aux procédés de la logique. C’est que la logique est souverainement exclusive. En rapprochant d’une idée première ses conséquences nécessaires, elle en éloigne tout le reste. Ainsi, serrant de près son point de départ, elle finit par faire une sorte de triage de toutes les idées possibles. Elle met à part celles que renferme l’axiome qui lui sert de base, et ce sont autant de vérités. Elle rejette dédaigneusement toutes les autres, et ce sont autant d’erreurs. Elle n’admet point de terme-moyen. Une logique qui tergiverse n’est plus de la logique.

Calvin était un de ces esprits extrêmes que la logique entraîne dans d’extrêmes erreurs. Il n’a pas vu que le principe de la faiblesse humaine n’est juste que dans une certaine mesure, et il a raisonné sur ce principe comme sur la vérité absolue. Il a abaissé l’homme pour l’humilier devant son Dieu, oubliant que la vraie humilité n’est pas la vertu d’un esclave, mais bien plutôt d’un roi déchu. Il n’a pas compris que notre grandeur est aussi réelle que notre faiblesse, et que, pour être juste, il faut concilier ces