Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/163

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tragédie, et d’une tragédie saisissante, car c’est la destinée de l’homme qui s’y joue sous nos yeux, et c’est au Calvaire que nous conduira le dénouement. Il y a dans Pascal quelque chose de Descartes et quelque chose de Shakespeare.

La plan de M. Astié nous paraît contraire au mouvement logique ; il ne l’est pas moins, selon nous, au mouvement oratoire. M. Astié invoque le génie de l’éloquence qui inspirait si heureusement Pascal ; nous l’invoquons à notre tour contre lui. C’est même à cet ordre de considérations que nous empruntons notre objection la plus forte. M. Astié nous pardonnera-t-il d’avoir violé les préceptes de sa rhétorique, en la réservant pour la dernière ?

Si Pascal eût mis immédiatement le pécheur auquel il a dévoilé sa misère en présence de l’homme-Dieu, quelle puissance aurait eue la dernière partie de l’œuvre, dans laquelle il serait revenu sur ses pas pour parler des prophéties, des miracles et des figures ? Il peut en parler avant d’avoir approché du lieu très saint ; l’intérêt dramatique, qu’il a trouvé le secret d’exciter, donne du prix à tout ce qui vient fortifier ce rayon de lumière, tout à coup découvert dans les ténèbres. Mais plus tard, quand le but est atteint, quand le soleil nous a été montré, quand la puissance de la preuve interne a dissipé tous les doutes, à quoi bon ces lumières nouvelles et incertaines qui s’éclipsent devant le grand astre ? à quoi