Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/263

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formes, ports, anomalies, etc. Ils n’aiment ni les hybrides ni les intermédiaires, et leurs catalogues sont ordinairement les plus courts. Là est le grand inconvénient pratique de l’idée préconçue de la permanence de l’espèce, elle conduit sans qu’on s’en doute à observer la nature en gros. Or la plupart des progrès accomplis par la science moderne ont été le produit d’études minutieuses, et l’on sent de plus en plus qu’il faut entrer dans le détail et le poursuivre jusqu’aux dernières limites du possible. Au fond, cette idée d’espèce représente à sa manière le besoin d’unité qui en toute chose travaille l’esprit humain ; mais elle est obscure et sommaire, et la seule manière de l’élucider est de procéder à une vaste enquête historique qui détermine jusqu’à quel point la variété peut s’introduire dans une seule et même postérité. L’enquête est commencée ; on la poursuit énergiquement, toutes les sciences ont été mises de réquisition ; mais en attendant que l’on ait des résultats positifs, l’idée même d’espèce est comme suspendue, et le mot n’existe plus dans la langue scientifique qu’à titre provisoire. Les naturalistes les plus éminents avouent qu’ils ne connaissent aujourd’hui que des formes plus ou moins distinctes, dont ils étudient la filiation soit en observant la nature vivante soit en interrogeant les restes du passé. En apparence la science s’est appauvrie, elle s’est enrichie en réalité. Autrefois, quand le botaniste