Page:Ramuz - Aline, 1905.djvu/139

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porté des framboises, je lui ai bien dit merci. Est-ce qu’il croirait que je n’ai pas été contente ? Il doit quand même savoir. »

Elle se tenait assise sur son lit, les yeux ouverts et fixés devant elle. L’obscurité était quelque chose de profond et d’épais comme une fourrure noire. De petits soleils rouges et bleus montaient dans l’air en tournant. Elle se frottait les yeux. Elle se demandait : « Qu’est-ce que j’ai ? Qu’est-ce que j’ai ? Pourquoi est-ce que je suis comme ça ? Est-ce le bon Dieu qui me punit ? » Ses pensées étaient comme les abeilles qui sont sorties un jour d’orage. Elle ne trouvait pas la bonne place dans son lit, son oreiller brûlait ; tantôt elle se découvrait, et elle avait le frisson ; tantôt elle se recouvrait et les draps étaient lourds sur elle comme une pierre. Et puis, lorsque le sommeil venait, elle avait des rêves,