Page:Raoul - Trois satiriques latins, vol 1 Juvénal, 1842.djvu/47

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Où l’on peut à nos mœurs opposer un grand homme !
Allons, que la pudeur reparaisse dans Rome :
Un troisième Caton nous est tombé des cieux.
Pourtant, homme de bien, les parfums précieux
Dont l’odeur vous trahit sous cette barbe épaisse,
Quel marchand les débite, et quelle est son adresse ?
On se plaint du sommeil de la loi Julia !
Mais celle qu’un tribun contre vous publia,
Devrait-elle dormir dans le siècle où nous sommes ?
Examinez d’abord, et scrutez bien les hommes ;
Ils sont pires que nous ; mais, des lois triomphant,
Quoiqu’ils en fassent plus, le nombre les défend,
Et tels qu’une phalange étroitement unie,
C’est la débauche entre eux qui produit l’harmonie.
Vous qui nous reprochez la honte de nos mœurs,
Parlez : nous voyez-vous imiter vos fureurs ?
Voyez-vous Catulla d’une odieuse flamme
Allumer les ardeurs au sein d’une autre femme ?
Comme Hippo qui, brûlant d’un exécrable amour,
Se livre à ses pareils qu’il outrage à son tour,
Et, tourmenté d’un mal qui consume sa vie,
Trahit par sa pâleur cette double infamie ?
Nous voyez-vous plaider, interpréter les lois,
Faire entendre au Forum de glapissantes voix ?
Peu de nous dans le cirque, émules indiscrète,
Vont se nourrir du pain que mangent les athlètes ;
Mais vous, de notre sexe efféminés rivaux,
Tournant mieux qu’Arachné le fil et les fuseaux,
Comme la concubine attachée à la chaîne,
Vous tenez la quenouille et travaillez la laine.
Hister, avant sa mort, fait présent sur présent
À la jeune moitié de l’ami complaisant
Qu’il a de tous ses biens nommé seul légataire.
On en sait la raison : celle qui peut se taire
Près d’un tiers en son lit entré pour son époux,