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Histoire philosophique
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XX. État de la Chine, ſelon les panégyriſtes.

Arrêtons-nous ſur ce peuple, ſi diverſement jugé par les Européens. Au tableau qu’en ont tracé les panégyriſtes, oppoſons celui qui vient de ſes détracteurs. Peut-être ſortira-t-il de ce contraſſe quelque lumière propre à rapprocher les opinions.

L’hiſtoire d’une nation ſi bien policée, diſent ſes partiſans, eſt proprement l’hiſtoire des hommes : tout le reſte de la terre eſt une image du cahos où étoit la matière avant la formation du monde. C’eſt par une continuité de deſtructions que la ſociété s’eſt eſſayée à l’ordre, à l’harmonie. Les états & les peuples y ſont nés les uns des autres comme les individus ; avec cette différence, que dans les familles la nature pourvoit à la mort des uns, à la naiſſance des autres, par des voies confiantes & régulières. Mais dans les états, la ſociété trouble & rompt cette loi par un déſordre où l’on voit, tantôt les anciennes monarchies étouffer au berceau les républiques naiſſantes, & tantôt un peuple informe & ſauvage, engloutir dans ſes irruptions une foule d’états brisés & démembrés.

La Chine a réſiſté ſeule à cette fatalité. Cet empire, borné au Nord par la Tartarie Ruſſe,