Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/327

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Celles qui demandent le plus de talent ſont exercées par les mains qui ont le plus d’argent ; les plus viles & les moins chères tombent ſouvent à des gens nés pour exceller dans un art diſtingué. Les uns & les autres, dans un métier dont ils n’ont pas le goût, négligent l’ouvrage & perdent l’art : les premiers, parce qu’ils ſont au-deſſous : les ſeconds, parce qu’ils ſe ſentent au-deſſus. Mais l’exemption des maîtriſes produit la concurrence des ouvriers, & dès-lors l’abondance & la perfection des ouvrages.

On peut mettre en queſtion, s’il eſt utile de raſſembler les manufactures dans les grandes villes, ou de les diſperſer dans les campagnes ? Le fait a décidé la queſtion. Les arts de première néceſſité ſont reſtés où ils ſont nés, dans les lieux qui leur ont fourni de la matière. Les forges ſont près des mines, & les toiles près des chanvres. Mais les arts compliqués d’induſtrie & de luxe, ne ſauroient habiter les campagnes. Diſperſez dans un vaſte territoire tous les arts qui concourent à la fabrication de l’horlogerie, & vous perdez Genève avec tous les métiers qui la font vivre. Diſperſez dans