Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/46

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de baſe. Il craint, par la raiſon même qu’il s’eſt fait craindre. L’uſage de la milice contre ſes ſujets, apprend à cette milice même ce qu’elle peut contre lui. Elle eſſaie ſes forces ; elle ſe mutine ; elle ſe révolte. L’impuiſſance du prince la rend inſolente. Son eſprit devient celui de la sédition ; & c’eſt alors qu’elle décide, & du maître & de ſes miniſtres.

Soliman, inſtruit par les troubles intérieurs qui avoient agité l’empire ſous les règnes de Bajazet II & de Selim II, des dangers dont lui & ſes ſucceſſeurs étoient menacés, n’imagina rien de mieux qu’une loi qui ôtoit aux princes de ſa maiſon, & le commandement des armées, & le gouvernement des provinces. Ce fut en enſeveliſſant dans l’obſcure oiſiveté d’un sérail ceux à qui leur naiſſance donnoit quelque prétention à l’empire, qu’il ſe promit d’ôter aux janiſſaires tout prétexte de sédition. Il ſe trompa. Cette mauvaiſe politique ne fit qu’accroître le mal, d’un mal peut-être encore plus grand. Ses ſucceſſeurs, corrompus par une molle éducation, portèrent en imbéciles le glaive qui avoit fondé, qui avoit étendu l’empire. Des princes ignorans, qui n’avoient fréquenté que des