Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/462

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prenoit conſeil que de l’amitié ? Comment ne pas favoriſer la pareſſe, ſi l’on ne conſultoit que la bienfaiſance ? Toutes ces vertus ont un terme, au-delà duquel elles dégénèrent en vices ; & ce terme eſt marqué par les règles invariables de la juſtice par eſſence, ou, ce qui revient au même, par l’intérêt commun des hommes réunis en ſociété, & par l’objet conſtant de cette réunion.

Eſt-ce pour lui-même qu’on érige en vertu le courage ? Non c’eſt à cauſe de l’utilité dont il eſt pour la ſociété. La preuve en eſt qu’on le punit comme vice dans l’homme qui s’en ſert pour troubler l’ordre public. Pourquoi la crapule eſt-elle un vice ? parce que chaque citoyen eſt tenu de concourir à l’utilité commune, & qu’il a beſoin, pour remplir cette obligation du libre exercice de ſes facultés. Pourquoi certaines actions ſont-elles plus blâmables dans un magiſtrat ou un général que dans un particulier ? c’eſt qu’il en réſulte de plus grands inconvéniens pour la ſociété.

Les obligations de l’homme iſolé me ſont inconnues. Je n’en vois ni l’origine ni le terme. Puiſqu’il vit ſeul, il a droit de ne vivre que pour lui ſeul. Nul être n’eſt en droit