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Histoire philosophique
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battre, une foule de raiſons phyſiques, morales & politiques. Nous ne nous arrêterons qu’à une, & ce ſera un fait. Depuis les Portugais, qui, les premiers, ont porté dans l’Inde des vues d’agrandiſſement, juſqu’aux Anglois qui terminent la liſte fatale des uſurpateurs, il n’y a pas une ſeule acquiſition ni grande, ni petite, qui, à l’exception du Bengale & des lieux ou croiſſent les épiceries, ait pu à la longue payer les dépenſes qu’a entrainées ſa conquête, qu’a exigées ſa conſervation. Plus les poſſeſſions ont été vaſtes, plus elles ont été onéreuſes à la puiſſance ambitieuſe, qui, par quelque voie que ce pût être, avoit réuſſi à les obtenir.

Il en ſera toujours ainſi. Toute nation qui aura acquis un grand territoire, voudra le conſerver. Elle ne verra ſa sûreté que dans des places fortifiées, & l’on en élèvera ſans nombre. Cet appareil de guerre éloignera le cultivateur & l’artiſte, également alarmés pour leur tranquilité. L’eſprit des princes voiſins ſe remplira de ſoupçons, & ils craindront, avec raiſon, de ſe voir la proie d’un marchand devenu conquérant. Dès-lors, ils méditeront la ruine d’un op-