Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v3.djvu/344

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parfaites ; une navigation auſſi ſuivie, auſſi étendue. Le revenu public montoit, dit-on, à 7 000 000 livres, richeſſe prodigieuſe dans un tems où l’or & l’argent étaient très-rares.

Tant d’avantages, loin de détourner les ſouverains de la Caſtille & de l’Aragon d’attaquer Grenade, furent les motifs qui les pouſſèrent le plus vivement à cette entrepriſe. Il leur fallut dix ans d’une guerre ſanglante & opiniâtre, pour ſubjuguer cette floriſſante province. La conquête en fut achevée par la priſe de la capitale, vers les premiers jours de l’an 1492.

III. Colomb forme le projet de découvrir l’Amérique.

Ce fut dans ces circonſtances glorieuſes, qu’un homme obſcur, plus avancé que ſon ſiècle dans la connoiſſance de l’aſtronomie & de la navigation, propoſa à l’Eſpagne heureuſe au-dedans de s’agrandir au-dehors. Chriſtophe Colomb ſentoit comme par inctinct qu’il devoit y avoir un autre continent, & que c’étoit à lui de le découvrir. Les Antipodes, que la raiſon même traitoit de chimère, & la ſuperſtition d’erreur & d’impiété, étoient aux yeux de cet homme de génie, une vérité inconteſtable. Plein de cette idée, l’une des plus grandes qui ſoient entrées dans