Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v7.djvu/90

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crèrent tout ce qui ſe préſenta. Le peu qui échappa à cette vengeance, abandonna pour toujours un établiſſement qui étoit encore au berceau.

Dans les premiers âges du monde, avant qu’il ſe fût formé des ſociétés civiles & policées, tous les hommes en général avoient droit ſur toutes les choſes de la terre. Chacun pouvoit prendre ce qu’il vouloit pour s’en ſervir, & même pour conſumer ce qui étoit de nature à l’être. L’uſage que l’on faiſoit ainſi du droit commun, tenoit lieu de propriété. Dès que quelqu’un avoit pris une choſe de cette manière, aucun autre ne pouvoit la lui ôter ſans injuſtice. C’eſt ſous ce point de vue, qui ne convient qu’à l’état de nature, que les nations de l’Europe enviſagèrent l’Amérique, lorſqu’elle eut été découverte. Comptant les naturels du pays pour rien, il leur ſuffiſoit, pour s’emparer d’une terre, qu’aucun peuple de notre hémiſphère n’en fût en poſſeſſion. Tel fut le droit public, conſtant & uniforme qu’on ſuivit dans le Nouveau-Monde, & qu’on n’a pas même eu honte de vouloir juſtifier en ce ſiècle, pendant les dernières hoſtilités.