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Page:Rebell - La Nichina, 1897.djvu/231

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— Ne craignez rien, mon seigneur, faisait-elle, ici nous sommes seuils. Personne n’a occupé la cellule voisine, depuis que le frère Tito y est mort de chagrin. Le bruit que vous entendiez tout à l’heure est dû sans doute à des rats, seuls visiteurs que nous ayons, dans ces tristes retraites.

On répondit de la sorte :

— Enfin, que veux-tu ?

C’était la parole hautaine du cardinal.

— Je veux savoir, reprit la première voix, pourquoi vous m’avez abandonné à la misérable existence du cloître après m’avoir enivré de vos belles promesses.

— Ah ! ah ! ah ! fit le cardinal, autant vaudrait demander au feu pourquoi il consume. Je t’ai aimé, je t’ai oublié. Et cela est tout simple, mon pauvre ami ; il n’y a que toi sans doute à ignorer que l’Amour est d’une nature inconstante et qu’il dédaigne aujourd’hui ce qu’il adorait hier.

— Je me le disais bien quand j’écoutais sans fureur vos horribles aveux, je me disais bien que j’allais être votre victime, et puis, je ne sais pourquoi, moi qui n’avais qu’un mot à prononcer, qu’un cri à faire pour vous dénoncer, j’ai tremblé devant vous, je me suis soumis à votre désir.

— Et tu as sagement agi. Autrement, tu te serais perdu et l’on ne t’aurait pas écouté. Car, tu ne t’imagines pas, je suppose, que l’accusation d’un moine comme toi peut renverser le légat. En vérité, mes pouvoirs seraient bien vains et inutiles s’il suffisait d’un mot pour les anéantir.

Mais la voix reprenait, humble et dolente :

— Je regarde vos yeux ; je me demande quelle étrange fascination ils exercent sur les hommes pour que moi, comme tant d’autres, j’aie dû servir vos