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LES NUITS CHAUDES DU CAP FRANÇAIS


de la milice avait déjà commencé les recherches, et qu’il pensait être sur une bonne piste ?

Elle me regarda fixement comme si elle eût voulu trouver dans mon regard un motif d’espérer, puis secouant la tête d’un air de désolation, elle me quitta sans un mot. Je la vis frapper à la porte de M. de la Pouyade. Puisse-t-il avoir témoigné quelque pitié à cette malheureuse mère ! Pour moi, sa vue m’avait atterrée ; je pleurai en pensant au rapt de sa fille, mais je songeais moins à son infortune qu’au péril de mon Antoinette. Que deviendrais-je si elle aussi ?… mais je ne veux pas croire que la destinée me réserve des peines si cruelles ; je n’y survivrais pas. D’ailleurs nous sommes deux à présent à veiller sur elle, et deux femmes qu’unissent l’amour et la haine ne sont-elles pas de bonnes gardiennes ?

Voici comment s’est faite cette nouvelle liaison. Ah ! bien étranges sont parfois les secours que nous envoie la Providence, mais nous courons des dangers si incroyables et nous avons des ennemis si inattendus !

Je rentrais aux Ingas en palanquin, menée à grande vitesse par mes quatre noirs que j’activais de la voix et d’une souple badine, dans mon impatience de revoir Antoinette. Le trouble que j’avais ressenti devant l’abbé de la Pouyade avait cessé ; je me sentais heureuse, pure de toute faute envers Dieu comme envers mon amour, prête à aimer mon enfant avec toute la force de mon âme et de mes sens. Déjà je me trouvais devant la porterie lorsque je croisai un palanquin qui revenait de la maison au galop, palanquin de fillette