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LES NUITS CHAUDES DU CAP FRANÇAIS


cheveux blancs, sous ma vieille peau le cœur est jeune encore.

— Mais vous disiez tout de suite, observa Agathe, que vous étiez indifférent à nos grâces.

— Je le voudrais, seulement la nature, par malheur, n’a pas permis…

— Et la faculté, reprit la malicieuse, a-t-elle permis au moins ? c’est là l’important.

— Allons, taisez-vous, Agathe, m’écriai-je, et vous, docteur, trêve à ces compliments où vous semblez à l’aise comme un chat dans une mare à canards. Dites-moi seulement comme il se fait qu’ayant juré de ne plus me voir qu’à mon lit de mort, vous vous trouviez si tôt devant moi.

— Mon serment, madame, n’avait rien de sérieux. On ne s’engage pas à faire le mal. J’étais seulement irrité de voir chez vous un coquin de l’espèce de Samuel Goring. Mais, si même nous avions été brouillés, je n’en serais pas moins venu aujourd’hui vous apprendre des événements que vous ignorez et que vous avez le plus grand intérêt à connaître.

Je le regardai. Son visage avait une expression grave qui m’émut.

— Je suis prête à vous écouter, lui-dis-je, curieuse et assez alarmée.

Il me laissa voir qu’il ne tenait point à parler devant les jeunes filles. Alors nous sortîmes, et évitant les oreilles indiscrètes, nous traversâmes le jardin pour gagner un petit pavillon qui donne sur la route du Cap et sur la mer.